Aupres des lointains !
Quand nous quittons Moron, mardi 11 septembre 2012, l'instant est d'importance, l'instant est solennel.
Nous partons pour ce qui aura la saveur exaltante d'un accomplissement mais qui prendra aussi necessairement le gout plus doux-amer d'une fin : Ulaan-Baatar.
Nous partons pour une derniere chevauchee dans la poussiere lointaine de l'est, nous partons porter une derniere fois notre regard aussi loin qu'il n'a jamais porte.
Nous partons pour un dernier 'ride' avant l'ombre et l'indifference.
Et tout dans la steppe semble s'animer davantage pour penetrer encore nos coeurs des derniers mysteres de l'est : les bergers nous saluent du haut de leur elegance simple, les chevaux redonnent de la chevauchee sauvage, les chameaux nous rejouent leur marche majestueuse, les oiseaux de proie tiennent la pose avec superbe, les yourtes s'ouvrent pour nous livrer leur discrets secrets.
On croit un instant quitter trop tot le reve : d'abord une route en construction ( a l'interieur de laquelle les plus fondamentalistes des mongols sont tout de meme parvenus a tracer une piste) puis on nous offre de l'asphalte qui afflaiblit notre contact avec nos lointains. 100km de bitume parfait, extremement durs a vivre.
Juste apres ca, le paysage est boulverse par l'extraction de l'or. Dans ce domaine, il y a deux ecole : ceux qui font des gros trous partout et ceux qui tamisent les miettes qu'ont laissees les premiers. Dans les deux cas, ca vous laisse avec une impression etrange.
Heureusement, on nous redonne bien rapidement de la piste, avec de la poussiere, de la grande, et en supplement un joli trafic de gros camions ce qui presente l'avantage inestimable de parfaire encore notre bronzage.
La steppe utilise toute la palette de ses talents pour prolonger l'aventure : des classiques paysages d'eternelle immensite aux toujours plaisants incidents mecaniques ( et il faut en plus qu'on s'occupe de ceux des autres !), en passant par les violentes attaques de moustiques ( notre camp s'en tire plutot bien : 3 piqures a deplorer contre 572 morts du cote d'en face) et les pittoresques villages du far-east.
Ci dessous, sequence 'ou est Charlie ?' :
( Olivier en inspecteur des travaux fini apres que Pierre a vole au secours du tracteur chinois, la rustine a la main)
La Mongolie cherche meme a nous surprendre dans des registres ou nous ne l'attendions certes pas. Au creux de ses immenses et inombrables ondulations, nous decouvrons ainsi :
- Des engins agricoles et des champs cultives ( la Mongolie n'est plus ce qu'elle etait !)
- Des bergers a moto ( sans commentaire)
- et des ponts et des panneaux directionnels (la Mongolie n'est decidement plus ce qu'elle etait !) !
- et encore plus suprenant, nous apprenons que certaines legendes du cinema ont choisi la Mongolie comme terre d'adoption pour leur retraite. C'est l'occasion pour nous de rencontrer le plus grand dynamiteur de l'histoire des revolutions (*) et un grand brun avec une saccoche rouge (**).
(* pour ceux qui ne situent pas bien, on vous laisse regarder a James Coburn)
(** pour celui-la, normalement c'est plus facile a situer)
Avant que la Mongolie finisse par delirer completement en essayant de nous eblouir, nous parvenons a rejoindre les abords de sa capitale. Nous retrouvons l'asphalte pour de bon cette fois-ci et nous abandonnons donc les outils qui nous etaient devenus chers ( GPS, carte, boussole et surtout le tres efficace mesureur de fraction de degre) pour les tres clairs panneaux lumineux qui permettent de s'orienter facilement dans la ville.
Et enfin, il est 16h03, mardi 18 septembre 2012, quand deux hommes, venus de l'ouest, penetrent dans l'artere principale de celle qui est reputee comme etant la plus moche fabuleuse capitale de la planete.
Mais quelle est cette etrange profondeur dont leur regard est empreint ? Sont-ils seulement fourbus, harasses ou plutot deboussoles par la civilisation qu'ils retrouvent dans cette grande ville ? Nul ne sait mais il reste que leur yeux porte la marque de ceux qui ont vus...les lointains. TAINLIN TAINLIN !!!
Oui, enfin bref, apres 6 mois jour pour jour, ( car comme Phileas Fogg nous profitons du decalage horaire) et presque 13000 km de velo, nous atteignons notre objectif et nous sommes pile sur le planning, et puis voila c'est tout. Le reste bon...c'etait sympa de se balader quoi.
Pour feter ca, quand meme, nous, on s'offre un petit champagne Piper-Heidsieck de derriere les fagots ( avec l'environnement qui lui sied bien autour), et puis, pour vous, lecteurs assidus ( ou pas, mais courageux en tout cas) de notre prose inepte, on vous laisse reprendre, selon votre convenance, un dernier ride de photos.
Au cas ou vous avez un petit creux la nuit, il y a toujours l'album : Mongolie 2
...le temps que la suite arrive car il nous reste un petit trajet a parcourir tout de meme : on n'est pas completement d'ici.